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Critique: Sherlock Holmes: The Devil’s Daughter

Voici notre critique du jeu Sherlock Holmes: The Devil’s Daughter, testé sur PS4 Pro:

Genre: Aventure et Point & Click
Développeur: Frogwares
Date de sortie: 10 juin 2016

Disponible sur PS4, Xbox One et PC

Site Web Officiel

Il est à l’heure actuelle inutile de se leurrer! Si Frogwares est connu pour sa longévité liée à la licence vidéoludique Sherlock Holmes, il faut reconnaître qu’entre le studio et les éditeurs français, c’est un peu l’amour vache. Tout d’abord, les Ukrainiens ont connu un bras de fer avec Focus Home Interactive entraînant la rupture de leur relation.

Puis ce fut au tour de Big Ben, dont la division d’édition se nomme désormais Nacon, qui connut un litige. De quoi réellement froisser notre âme de joueur?

Négatif mon capitaine! Chaque chose mérite une analyse par les personnes aux compétences spécifiques. Alors autant vous avouer que dans cette catégorie, nous en sommes dénués! Voilà, c’est dit.

Cependant, replonger dans un titre qui commence à accuser les années n’est pas anodin. En effet, les bases de l’imparfait mais fascinant The Sinking City, dont le NBK a livré un test à une autre époque, se trouvaient à cet endroit précis. Ainsi, cela explique les similitudes entre les 2 œuvres des développeurs qui apprennent à grandir en même temps qu’elles.

C’est en ce sens qu’il était essentiel de vous emmener avec nous dans les rues de Londres en compagnie d’un détective devenu une Légende. Un pedigree de choix qui n’est pas sans conséquence, entraînant attentes et désirs ardents. De quoi nous donner l’envie de jeter un coup d’œil par la fenêtre, de nous travestir pour se fondre dans la foule, de repérer la moindre trace anormale. Prêts à nous accompagner dans cette affaire victorienne?

Watson of the beach

Nul besoin d’être un grand devin ou d’ouvrir une boîte de pandore factice afin de confirmer notre affirmation: l’illustre Sherlock Holmes est une figure familière pour chacun d’entre nous. Que les lignes de Sir Conan Doyle soient lues ou non, l’histoire ne retient que la représentation fantasmée du détective au don incroyable. A la limite du mystique où s’entremêlent intelligence, flegme britannique et humour! Souvent injustement résumé au traditionnel et galvaudé “élémentaire, mon cher Watson!”, l’ouvrage a traversé les âges. Jusqu’à en connaître de multiples déclinaisons, de la bande dessinée au 7ème art en passant par le jeu de société.

Un schéma très connu qui inspira tant d’artistes et de disciplines. Cependant, que le doute soit dissipé si vous n’êtes que peu familiers avec l’univers! En dépit de multiples références diffusées tout au long de The Devil’s Daughter, rien ne vous oblige à être spécialiste de la littérature. Quelques repères vous échapperont sans que le scénario ne paraisse opaque. D’ailleurs, inutile d’avoir suivi tous les épisodes élaborés par Frogwares. Ce Sherlock Holmes est sans conteste un consommable en stand-alone. Un gain pour les nouveaux-venus!

D’autant plus que de multiples libertés sont prises, sans dénaturer le matériau d’origine. De plus, nous ne pouvons que saluer l’hétérogénéité des thématiques, allant des relations familiales à l’occultisme, le tout saupoudré de combines mafieuses. Alors certes, certains pans du scénario et certaines représentations sont moins justes. Comme à notre habitude, point de spoil ici. Néanmoins, sachez que le découpage du récit peut surprendre. En effet, si les enquêtes sont indépendantes, elles sont reliées par un fil rouge. Et si celui-ci est relativement épais au tout début, il a tendance à s’étioler jusqu’à un épilogue efficace quoique relativement mal amené.

Pas une grande tare mais il est toujours frustrant de constater des ellipses assez conséquentes au milieu d’une écriture de qualité. Si l’ensemble tient largement la route, force est de constater que certains personnages auraient mérité un développement plus poussé. A titre d’exemple, Sherlock monte en puissance peu à peu, passant d’une relative antipathie à un respect vertueux. Tout l’inverse d’un Watson qui déclenche une empathie directe qui n’évolue que peu ou prou. Cantonné à un rôle de faire-valoir, il n’interagit finalement que très rarement avec notre héros à l’exception d’une scène particulièrement réussie servant d’introduction à un 4ème chapitre fabuleux.

Rien de bien grave en somme. Juste un léger regret.

Un Holmes extraordinaire

Oui, nous diriez-vous, une adaptation présente toujours le risque de capitaliser uniquement sur son nom. Remercions la Providence frères et sœurs: les créateurs ont largement surmonté cet écueil. Sherlock Holmes: The Devil’s Daughters reste une belle référence issue du Point and Click… pour tout public. Il suffit juste d’accepter que l’ensemble se montre particulièrement dirigiste et assez facile d’accès. Aucune grosse prise de tête pour aboutir à ses fins, ce qui chagrinera sûrement les puristes. En revanche, les occasionnels ou disciples du genre sortiront avec une satisfaction effervescente tant le cahier des charges est rempli. De plus, si le jeu ne révolutionne en rien la formule, il octroie des subtilités qui réduisent le cauchemar de la stagnation à néant. Effectivement, refuser d’évoluer, c’est périr. Telle semble être la profession de foi des géniteurs.

Concrètement, le soft se déroule de façon linéaire. Observer les environnements est une base indéboulonnable, ne serait-ce que pour recouper les indices et poursuivre la bonne piste. Car dans Sherlock Holmes, il est possible d’associer des idées qui ne sont pas les bonnes et qui vous emmènent vers des chemins tortueux. Erronés, de surcroît. Toutefois, même si un autre mode de difficulté limite l’ensemble, vous ne serez jamais laissé dans la béatitude. Pour mieux illustrer le propos, 2 conclusions contradictoires seront mises en valeur dans votre carnet afin de vous laisser aller vers une nouvelle réflexion. En parlant d’ergonomie, il est bluffant de constater que tout est clair dans les menus. Par exemple, les gâchettes permettent instinctivement de passer de la fiche des protagonistes vers les preuves ou encore vers la page des lignes des dialogues.

Oui, le langage est une composante essentielle de la diégèse. Vous aurez des discussions avec beaucoup de personnes, sachant que la véracité n’est pas forcément le maître-mot. C’est à ce moment précis que les interrogatoires prennent tout leur sens! Les témoins sont nombreux mais certains ont un penchant pour le mensonge. Si, comme nous, vous fûtes happés par ce désir d’extirper les informations à celui ou celle qui vous fait face, le nom de L.A Noire devrait vous hanter. Les changements d’expression permettaient de savoir quand l’interlocuteur était en difficulté pour cacher un secret. Un procédé identique dans Sherlock Holmes?

Malheureusement, la réponse est non. Au moins, aucune accusation de plagiat ne peut être avancée. Mais si seulement… Il est dommage d’être confronté à une limitation technique qui, même sur PS4 Pro, ne permet pas d’avoir un rendu facial suffisamment animé pour aboutir à cet objectif. Probablement conscient de cet écueil, le studio mise avec brio sur une parade pertinente: l’observation. A vous de scruter le physique de la personne questionnée pour y déceler certains indices indispensables au dressage de portrait psychologique! A vous de déduire les choses correctement: une main à la coloration violette signifie une brûlure récente ou une maladie ? Une blessure est-elle accidentelle ou volontaire ? A vous d’être minutieux afin de déclencher un QTE durant la conversation qui vous donnera une précieuse information.

Pour la jouer petits bras, nous oserions dire que c’est élémentaire! Encore fallait-il y penser…

Watson et les matines

Globalement, il est impossible de parler de monotonie durant l’aventure proposée par Sherlock Holmes. Si quelques petites baisses de régime sont à relever, comment ne pas être ébloui par les fulgurances absolument géniales de la première et 4ème enquête? Les surprises sont toujours de taille et nous n’avons jamais éprouvé un sentiment de lassitude ni de répétition à outrance. Evidemment, la perfection n’est pas non plus de sortie. Le jeu ne brille pas toujours dans toutes ses énigmes comme en atteste cette phase absolument atroce du temple. Longue, pénible, insatisfaisante, elle dénote avec une feuille de route jusque-là maîtrisée. Par bonheur, elle est rapidement oubliée. Les scènes sont suffisamment entrecoupées et diversifiées: des moments de détente sont là pour vous faire souffler. Comment ne pas évoquer les mini-jeux comme le boulingrin, un équivalent de la pétanque fun à souhait ?

De plus, d’autres séquences pointent le bout de leur museau pour recentrer les joueurs. C’est qu’il y a un buffet copieux dans ce Sherlock Holmes! Trop diront certains. Toujours est-il que l’ennui est proscrit et que si le gameplay n’est pas toujours poussé, il s’avère suffisant. Au demeurant, bien des années plus tard, les moments d’action de The Sinking City donneront raison à nos propos: Frogwares n’est pas le plus à l’aise dans ce domaine. Ici, il s’agira plutôt de s’infiltrer, assurer une filature ou coopérer avec l’ami Watson. Vous pourrez incarner temporairement d’autres protagonistes et le point d’orgue sort du bois lorsqu’il s’agit de prendre les commandes de Toby, le chien du détective! Hallucinant mais sensationnel!

Les événements “à remonter” sont aussi jouissifs. Retrouvé dans l’essai lovecraftien des développeurs, ce procédé ne manque jamais à ses obligations. Un principe évident: plusieurs actions à remettre dans le bon ordre pour retrouver ce qui aurait pu déclencher une querelle. Un bref aperçu des options fournies. Tout juste regrettons-nous leur rareté tant cela donne un cachet à la production qui étoffe le savoir-faire hors du commun du détective. D’ailleurs, 2 formes de vision lui permettent de mettre en surbrillance des objets ou d’imaginer le déroulement d’une scène qui vient de se produire. Une manière de s’identifier encore plus à notre fin limier, ôtant cette désagréable sensation de n’être qu’un accompagnateur inutile.

Pour le reste, comme évoqué plus haut, vous agirez à coup de QTE qui feront appel soit à vos réflexes, comme pour une course-poursuite, soit à votre dextérité (nous pensons immédiatement aux occasions demandant de conserver l’équilibre). Du classique, c’est indéniable. Toutefois, nous ne pouvons que mettre en exergue une utilisation rodée qui évite toute possibilité de consternation réitérée. Il faudra néanmoins composer avec un lock des objets parfois hasardeux à la manette, exigeant une précision trop conséquente alors que les commandes se montrent parfois capricieuses. On se consolera avec l’alternative permettant de switcher entre la vue TPS et FPS. C’est bien peu…

A la longue, l’esthète est en mesure de s’y accommoder même si un ajustement semble nécessaire pour la prochaine itération. Encore une fois: une certaine œuvre basée sur Cthulhu est incrustée dans le CV des développeurs…

Holmes to be alive

Enfin, quel est le bilan formel de ce Sherlock Holmes? Mitigé. Si l’ambiance est parfaitement retranscrite et que la direction artistique revêt sa plus belle robe, tout n’est pas idyllique. Entre tearing régulier, chutes nombreuses des FPS et animations parfois à la ramasse, il y a hélas un panel de reproches à effectuer. Une nouvelle fois: rien de rédhibitoire et plantages comme scripts non-déclenchés sont aux abonnés absents. Mais quelle calamité de se dire que tout cela arrive malgré des environnements figés et des actions de PNJ cycliques. D’accord, l’impression de vie y est en faisant abstraction de tout cela. Oui, les effets de lumières sont particulièrement réussis. Nonobstant toutes ces qualités, les gaffes sont les vices de ce jeu, même lors de sa sortie, en 2016. On notera néanmoins un effort pour rendre plus supportable les temps de chargement qui vous permettent de consulter vos notes à tête reposée.

Malgré tout, la magie opère grâce à un sound-design difficilement attaquable. Les bruits d’atmosphère comme ceux des actions sont grandioses, à l’instar d’une OST qui joue parfaitement son rôle en misant sur une discrétion salutaire. Une identité propre qui ne baisse jamais en intensité et qui ne fait que nous ravir. Et en dépit d’une impossibilité de choisir la langue, ce qui est difficilement acceptable de nos jours, la VF fait le travail. Peut-être que certaines voix manquent légèrement d’implication mais rien de bien flagrant et le travail est à saluer. Mais nous le maintenons: la VO aurait eu toute sa légitimité au regard du contexte. On parle de Sherlock Holmes, bon sang!

Ne crachons pas dans la soupe les amis. D’une parce que c’est quand même dégoûtant. Et surtout en raison d’une traduction sérieuse qui évite les non-sens! Que vous raconter de plus? Que la sensation de voyage est bien présente malgré une aire géographique restreinte et que la multiplicité des biomes nous contente amplement. En intérieur ou en extérieur, le calque est proscrit afin de vous tenir en haleine. Nul doute qu’entre le moment où vous espionnez une conversation d’ivrognes et un échange mondain, le lieu se doit d’être irréprochable. Ce qui est le cas du rendement de Sherlock Holmes!

Avant de conclure, il est important d’appréhender un choix fort du studio. Ainsi, vous remarquerez que les visages ont sensiblement évolué. Il s’agit de “moderniser” chaque protagoniste, en s’inspirant notamment des longs-métrages actuels. Notre bon Sherlock possède donc un faciès plus proche d’un Robert Downey Jr. que de ce que l’imaginaire collectif a pu établir. Cela ne constitue pas un réel problème et, à moins d’être totalement hermétique, cela fonctionne plutôt bien. Notamment pour ce cher Watson!

De plus, la possibilité de customiser notre héros avec plusieurs vêtements (du décontracté au plus classe) ou coiffes donne l’opportunité de s’identifier à lui. Surtout que cela pourra se montrer parfois utile mais nous vous laissons le soin de percer vous-même le mystère!

Pour comprendre le sens d’un essai, il est parfois nécessaire d’en rechercher les fondements. Et dans le cas de Frogwares, ce Sherlock Holmes: The Devil’s Daughter, pourtant issu d’une longue lignée, est le laboratoire parfait pour ce qui deviendra par la suite l’étrange et captivant The Sinking City.

Pétri de bonnes intentions malgré certaines failles parfois gênantes, le rejeton du studio parvient à faire mouche tout en visant un large public. Sans chercher une complexité parfois effarante, le jeu trouve son identité tout en se parant d’une accessibilité enchanteresse.

Sans trahir sa lignée d’origine ni l’ensemble de la licence, cet épisode se permet quelques expérimentations qui étoffent parfaitement l’univers auquel il appartient. Diamant parfois poli incorrectement, Sherlock Holmes: The Devil’s Daughter reste une valeur sûre à défaut d’être un must-have.

Cependant, passer à côté reviendrait à manquer son initiation dans la chronologie de la saga ou dans celle des développeurs. D’autant plus que le prix actuel est plus qu’abordable. Seuls les fans inconditionnels d’action ou les allergiques au genre ne seront pas invités au bal. Pour les autres, il s’agira d’une aventure solide et parfois sordide!

Doté d’un récit d’un calibre respectable malgré quelques sautes de concentration, le petit frère de la série se laisse apprécier pour ce qu’il est sans prétendre à un glamour qui pourrait se montrer tumultueux si la copie n’est pas suffisamment brillante.

Un joli croquis dont la méconnaissance ne changerait pas la beauté de votre culture vidéoludique mais qui en constituerait un accroc. Ce qui serait, accordons-nous, funeste.

A vous désormais d’affronter le crime!

Merci d’avoir pris le temps de lire notre critique du jeu Sherlock Holmes: The Devil’s Daughter. N’hésitez pas à nous donner vos avis sur ce jeu dans la section commentaire, ci-dessous!

No Bloody Knows
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Sorte de mixture issue des années 80 et 90, le No Bloody Knows, ou le NBK pour les plus pressés, se consomme en duo. Une facette double qui trouve son inspiration dans l'indie ou les productions à moindre budget. Un accent marqué du Nord de la France, une passion pour le Beat'em Up et une envie de découvrir ce que la passion a de plus beau : la créativité! Un plaisir de partager notre expérience car nous tous, nous sommes la Pop Culture.

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